Fiscalité des opérations internationales au Maroc
Nawar Mounchit • 8 septembre 2025

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Fiscalité des opérations internationales au Maroc : Cadre, enjeux et pratiques de sécurisation


La montée en puissance des flux transfrontaliers place la fiscalité internationale au cœur des décisions stratégiques des entreprises opérant au Maroc. Une cession de droits de propriété intellectuelle à un partenaire étranger, le paiement de redevances pour l’usage d’un logiciel développé hors du territoire, la rémunération d’un prestataire de services établi à l’étranger, la distribution de dividendes à une maison mère non résidente, ou encore la refacturation intragroupe : autant d’opérations qui soulèvent immédiatement des questions de territorialité, de retenue à la source et de risque de double imposition. L’enjeu est double : assurer la conformité des traitements fiscaux et, simultanément, préserver la compétitivité par une charge fiscale optimisée et sécurisée.


Avant d’exposer les mécanismes pratiques, il convient de rappeler que la matière est régie, d’une part, par le Code Général des Impôts tel que modifié par les lois de finances successives et, d’autre part, par les conventions fiscales internationales conclues par le Royaume du Maroc avec de nombreux États, dont l’objet est d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion fiscale. La doctrine administrative (circulaires et notes de la Direction Générale des Impôts) éclaire l’interprétation de ces textes, tandis que la pratique contentieuse rappelle l’importance des preuves et de la traçabilité.


1. Déterminer la territorialité et qualifier correctement le revenu


Tout traitement fiscal international débute par une double lecture. Il faut d’abord apprécier, au regard du droit interne, si le revenu est réputé de source marocaine ou non, en tenant compte du lieu d’exploitation générateur du revenu, de l’établissement du débiteur et, pour certains flux, du lieu d’utilisation économique de la prestation. Il convient ensuite de qualifier la nature du revenu avec précision — dividendes, intérêts, redevances, rémunérations de services techniques ou intellectuels — car la qualification emporte des conséquences directes sur l’existence et l’intensité d’une imposition au Maroc.


Cette étape de qualification n’est pas purement théorique : une prestation présentée comme un « service » peut, selon les clauses contractuelles et la réalité économique, relever de la catégorie des redevances si elle emporte la mise à disposition de droits incorporels. À l’inverse, une licence de logiciel sans transfert de droits au-delà de l’usage strictement personnel peut s’analyser différemment. L’analyse contractuelle et la substance des flux commandent la suite.


2. Les retenues à la source sur les paiements vers l’étranger


Lorsqu’un débiteur établi au Maroc verse à un bénéficiaire non résident une rémunération entrant dans le champ de l’impôt au Maroc, le mécanisme usuel est celui de la retenue à la source. En pratique, les dividendes distribués à des actionnaires étrangers, les intérêts versés aux prêteurs non résidents, ainsi que les redevances afférentes à l’usage ou à la concession de droits incorporels, sont susceptibles d’être appréhendés par ce mécanisme. Certaines rémunérations de prestations de services rendues par des entités établies à l’étranger peuvent également entrer dans ce champ, en fonction de la localisation de l’utilisation et des critères retenus par le droit interne.


La retenue à la source n’est pas qu’un taux : c’est une obligation formelle du payeur marocain, qui agit comme collecteur. Elle suppose l’identification exacte de la nature du flux, la détermination de la base imposable, le respect du calendrier de reversement et la conservation des pièces justificatives. Lorsque le bénéficiaire non résident entend invoquer une convention fiscale pour réduire ou éliminer la retenue, le débiteur marocain doit exiger la preuve de résidence fiscale du bénéficiaire et s’assurer que les conditions conventionnelles sont remplies, notamment la qualité de bénéficiaire effectif et l’absence d’un établissement stable au Maroc auquel rattacher le revenu.


3. Conventions fiscales et élimination des doubles impositions


Les conventions fiscales prévalent sur la loi interne lorsqu’elles aboutissent à une imposition plus favorable, sous réserve de respecter strictement leurs conditions. Elles reposent sur des principes constants : répartition du droit d’imposer entre l’État de la source et l’État de résidence, définition des revenus (dividendes, intérêts, redevances, bénéfices des entreprises), règles relatives aux établissements stables et mécanismes d’élimination de la double imposition.


Deux méthodes dominent. La méthode du crédit d’impôt permet à l’État de résidence d’imputer l’impôt payé à la source sur l’impôt dû localement, dans la limite de ce dernier. La méthode de l’exemption prévoit, pour certains revenus, l’exonération dans l’État de résidence lorsque l’imposition a été opérée dans l’État de la source. Dans la pratique, l’entreprise marocaine doit être en mesure de produire, à la demande de l’administration, le certificat de résidence fiscale du bénéficiaire étranger, les attestations de retenue le cas échéant, ainsi que le contrat et les justificatifs économiques du flux. L’absence ou l’insuffisance de ces documents expose à un rehaussement, parfois accompagné de pénalités.


4. TVA et opérations internationales : exportations, importations et services


La taxe sur la valeur ajoutée appelle une logique propre. Les exportations de biens sont, en principe, exonérées avec droit à déduction, sous réserve d’apporter la preuve matérielle de la sortie du territoire. Les exportations de services bénéficient également d’un régime d’exonération lorsque le service est effectivement rendu à l’étranger et consommé par un preneur établi en dehors du Maroc, ce qui suppose une analyse fine des flux et de la documentation contractuelle. À l’inverse, les importations sont soumises à la TVA, généralement perçue à la douane pour les biens ou autoliquidée selon les cas pour certaines prestations. La clé, ici encore, réside dans la preuve : lettres de transport, déclarations en douane, attestations des preneurs, descriptifs fonctionnels des prestations et tout élément de traçabilité.


5. Prix de transfert : principe de pleine concurrence et dossier justificatif


Dès qu’existent des liens de dépendance entre l’entreprise marocaine et une entité liée à l’étranger, la fixation des prix intragroupe doit respecter le principe de pleine concurrence. Autrement dit, les conditions financières et commerciales doivent refléter celles que des parties indépendantes auraient convenues dans des circonstances comparables. La conformité se démontre, elle ne se proclame pas : l’entreprise doit constituer un dossier de prix de transfert exposant la politique intragroupe, la segmentation des activités, la sélection des méthodes (prix comparable sur le marché, coût majoré, marge nette transactionnelle, etc.), ainsi que les comparables retenus et les ajustements opérés.

En cas de contrôle, l’absence de documentation ou une documentation lacunaire fragilise la défense et peut justifier un redressement du résultat imposable, assorti de pénalités. La mise à jour régulière du dossier, l’alignement des contrats intragroupe avec la réalité opérationnelle et la cohérence des flux financiers avec la substance économique sont indispensables.


6. Sécuriser les flux : contrats, preuves et démarches préalables


La sécurité fiscale des opérations internationales se construit en amont. Les contrats doivent décrire précisément la nature des prestations, les droits concédés, les modalités de rémunération et les obligations documentaires des parties. Les entreprises gagneront à instaurer des check-lists internes pour chaque typologie de flux : vérification de la qualification du revenu, examen de la convention applicable, collecte des certificats de résidence, contrôle des seuils et conditions conventionnels, détermination des obligations déclaratives et calendaires, archivage des pièces en format exploitable.

Dans les situations présentant une complexité particulière — rémunérations mixtes mêlant services et droits incorporels, chaînes de facturation intragroupe, refacturations de coûts partagés, ou structurations impliquant plusieurs juridictions — il est opportun d’envisager des échanges préalables avec l’administration, afin d’obtenir une lecture partagée du traitement fiscal envisagé. Cette pratique, lorsqu’elle est correctement documentée, réduit l’aléa et sécurise la position de l’entreprise.


7. Contentieux et contrôle : logique de risque et gouvernance fiscale


La multiplication des échanges internationaux s’accompagne d’un renforcement des contrôles ciblés sur les flux sortants et les schémas intragroupe. La meilleure défense reste la cohérence : cohérence entre le contrat et la prestation effectivement rendue, cohérence entre la rémunération et la valeur créée, cohérence entre la qualification fiscale et la réalité économique. La gouvernance fiscale de l’entreprise doit intégrer des procédures de validation, des responsabilités clairement attribuées et un référentiel documentaire centralisé. En cas de désaccord avec l’administration, la voie contentieuse suppose une stratégie probatoire solide, appuyée par des éléments contemporains à l’opération.


8. Études de cas illustratives


Lorsqu’une société marocaine acquitte une redevance au profit d’un éditeur étranger pour l’usage d’un logiciel métier, la première question est de savoir si la rémunération rémunère l’accès à un service standard ou l’octroi de droits incorporels. Dans le premier cas, la TVA peut être appréhendée par autoliquidation et la retenue à la source dépendra de la qualification voie interne et conventionnelle ; dans le second, une retenue peut s’appliquer, sous réserve des stipulations de la convention fiscale concernée.


De même, lorsqu’une filiale marocaine distribue des dividendes à une maison mère non résidente, la loi interne prévoit un mécanisme de retenue, généralement modulé par la convention liant le Maroc à l’État de résidence de l’actionnaire, à condition que ce dernier en soit le bénéficiaire effectif et fournisse un certificat de résidence en cours de validité.


Enfin, pour une prestation de conseil rendue depuis l’étranger au bénéfice d’un preneur marocain, l’analyse combine la territorialité de l’impôt sur le revenu des non-résidents, l’éventuelle qualification conventionnelle du service et la TVA selon le lieu d’utilisation. L’issue dépendra du contenu réel de la prestation, des lieux où elle est exploitée et de la documentation disponible.


9. Conclusion : conformité, prévisibilité et compétitivité


La fiscalité des opérations internationales est un droit de précision. Les mêmes flux, mal qualifiés ou faiblement documentés, peuvent conduire à une double imposition ou à des pénalités évitables. À l’inverse, une démarche structurée — qualification rigoureuse, usage approprié des conventions, documentation probante, politique de prix de transfert conforme — permet de conjuguer conformité et prévisibilité, au service de la compétitivité. L’accompagnement d’un conseil spécialisé, familier des pratiques administratives et des conventions applicables, transforme un terrain d’incertitudes en trajectoire sécurisée.



par Ali FARES 8 septembre 2025
Procédure de dépôt de marque au Maroc
par Imane BENCHAQROUN 8 mai 2025
Procédure de dédouanement des marchandises au Maroc : cadre général, spécificités régionales et exonérations pour les ONG Dans un contexte de mondialisation croissante et d’intensification des échanges commerciaux, la maîtrise du cadre juridique applicable au dédouanement des marchandises est devenue un enjeu stratégique pour les entreprises opérant au Maroc, comme pour les acteurs internationaux souhaitant y développer leurs activités. Ce sujet revêt un intérêt particulier non seulement en raison de la complexité des procédures douanières, mais également au regard des implications fiscales, logistiques et réglementaires qui en découlent. Il est d’autant plus crucial dans certaines régions du Royaume, comme les provinces du Sud, ou dans des contextes spécifiques tels que l’acheminement de l’aide humanitaire. Cet article vise à offrir une synthèse claire et opérationnelle des principales règles encadrant le dédouanement, tout en mettant en lumière les régimes dérogatoires et les dispositifs d’allègement disponibles pour certains opérateurs. 1. Le régime juridique du dédouanement au Maroc Le dédouanement des marchandises au Maroc est encadré principalement par le Code des Douanes et Impôts Indirects ( ci- après désigné par "CDII"), ainsi que par les textes réglementaires émanant de l’Administration des Douanes et Impôts Indirects (ci- après désignée par "ADII"). Ce processus constitue une étape essentielle de l’admission en libre circulation de marchandises importées ou exportées, et implique le respect de règles strictes en matière de déclaration, de contrôle et de liquidation des droits et taxes. L'opération de dédouanement débute par la constitution d’un dossier comportant les pièces exigées, telles que la facture commerciale, le certificat d’origine, le document de transport, et, le cas échéant, des licences d’importation. L’importateur ou son représentant en douane doit établir une déclaration via la plateforme électronique BADR (i.e: Base Automatisée des Douanes en Réseau), en mentionnant de manière précise l’espèce tarifaire des marchandises, leur origine, leur valeur, ainsi que leur destination finale. Cette déclaration, déposée auprès du bureau territorialement compétent, est accompagnée des pièces justificatives nécessaires à l’examen de la régularité de l’opération. En fonction de la politique de gestion des risques appliquée par l’ADII, la déclaration peut faire l’objet d’un simple contrôle documentaire ou, le cas échéant, d’un contrôle physique. Une fois ces contrôles effectués, les droits et taxes sont liquidés, notamment les droits de douane, la taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que les droits d'accise ou taxes parafiscales, selon la nature des marchandises concernées. Cela étant, il convient de préciser que la mainlevée des marchandises est conditionnée au paiement effectif de l’ensemble des impositions dues, conformément aux dispositions du Code précité. Cette étape marque l’achèvement du processus douanier et permet la mise en circulation des marchandises sur le territoire national. En complément de la procédure dite "normale", le législateur a prévu des mécanismes alternatifs destinés à répondre aux besoins des opérateurs économiques. Ainsi, une procédure simplifiée peut être mise en œuvre pour certains opérateurs, permettant de différer la production de certains éléments déclaratifs, sous réserve de l’octroi d’une autorisation préalable. Ajoutons à cela que le dédouanement à domicile constitue également une procédure dérogatoire permettant aux entreprises disposant d’un agrément de procéder au contrôle et à la déclaration des marchandises dans leurs propres locaux. En outre, les Magasins et Aires de Dédouanement (MEAD) bénéficient d’un régime spécifique, reposant sur une déclaration sommaire unique permettant le traitement des flux commerciaux sous surveillance douanière. 2. L’application des règles douanières dans les provinces du Sud La question des démarches à accomplir dans les province du sud est récurrente. Beaucoup, pensent à tord, qu'il existe des procédures particulières, différentes ou simplifiées. Le territoire douanier marocain est défini de manière unifiée à l’article premier du Code des Douanes, qui n'opère aucune distinction territoriale entre les différentes régions du Royaume. Les provinces du Sud, à savoir les régions administratives de Laâyoune-Sakia El Hamra, Dakhla-Oued Eddahab et Guelmim-Oued Noun, sont intégralement intégrées dans ce territoire douanier, de sorte que l’ensemble des règles douanières y trouvent pleine application, sans régimes spécifiques dérogatoires. Il en résulte que les formalités de dédouanement y sont appliquées conformément aux mêmes normes procédurales et techniques que dans le reste du pays. Toutefois, dans le cadre de la mise en œuvre de la régionalisation avancée, telle qu’adossée à la Loi organique n° 111-14 relative aux régions, certaines politiques de soutien au développement économique peuvent impliquer des incitations fiscales ou des priorités administratives, sans pour autant créer de régime douanier autonome. En pratique, les facilités d’ordre administratif ou fiscal offertes dans ces régions s’inscrivent dans les orientations du Nouveau Modèle de Développement des Provinces du Sud, lancé en 2015, qui vise à renforcer leur attractivité économique. Elles doivent toutefois être validées au cas par cas par les services régionaux de l’Administration des Douanes, en concertation avec la Direction générale et les ministères sectoriels concernés. 3. Les régimes d'exonération et procédures particulières applicables aux ONG humanitaires Le droit marocain reconnaît la possibilité pour les organisations non gouvernementales intervenant dans le domaine humanitaire de bénéficier d’exonérations douanières et fiscales, sous réserve du respect de certaines conditions strictement encadrées. Ces exonérations sont prévues tant par le Code Général des Impôts (CGI) que par les accords bilatéraux ou multilatéraux auxquels le Royaume est partie, notamment ceux régissant les opérations de secours en situation d’urgence. L’article 92-1° du CGI prévoit ainsi une exonération de la TVA à l’importation pour les équipements, matériels et dons destinés à une utilisation humanitaire, sous réserve que l’importation soit effectuée par ou pour le compte d’associations reconnues d’utilité publique. Cette exonération est accordée sur présentation d’un dossier complet comprenant notamment une demande formulée selon un modèle officiel, une facture pro forma et une attestation de donation validée par l’autorité compétente. L’exonération des droits de douane, quant à elle, peut être accordée en vertu de conventions spécifiques ou en application des dispositions adoptées dans le cadre de la coopération internationale en matière d’aide humanitaire. Dans le cas de situations de crise ou d’urgence, l’ADII peut mettre en place des procédures allégées de dédouanement, notamment en ce qui concerne les formalités déclaratives, afin de permettre l’acheminement rapide des secours. Ces procédures s’inscrivent dans le respect des normes édictées par l’Organisation mondiale des douanes et par les organes compétents des Nations Unies. Il convient de souligner que l’octroi effectif des exonérations est conditionné à la nature humanitaire de la mission, au statut juridique de l’entité bénéficiaire, ainsi qu’à l’affectation exclusive des biens aux fins déclarées. En pratique, les ONG internationales s’appuient fréquemment sur des partenaires locaux reconnus pour faciliter leurs démarches administratives, notamment en matière de reconnaissance d’utilité publique et d’obtention des autorisations requises. Imane BENCHAQROUN
Régime TVA
22 janvier 2025
La TVA dans le secteur de l'enseignement privé au Maroc : Enjeux et perspectives fiscales Le régime fiscal des établissements d’enseignement privé au Maroc suscite de nombreuses interrogations, notamment en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Cette brève analyse vise à éclairer les spécificités fiscales de ce secteur et à proposer des solutions concrètes pour alléger la charge fiscale pesant sur ces institutions stratégiques pour le pays. Un cadre législatif conçu pour soutenir l’éducation Conformément à l’article 91-1° du Code Général des Impôts (CGI), les prestations d’enseignement et les activités qui leur sont directement liées bénéficient d’une exonération de TVA. Cette exonération vise à alléger les coûts des établissements scolaires et concerne notamment : Les frais d’inscription et de scolarité : Les sommes perçues pour les cours dispensés sont exonérées en vertu de l’article 91-1°-a du Code Général des Impôts (CGI) Les services éducatifs annexes : L’utilisation des bibliothèques, des laboratoires ou encore des outils pédagogiques est incluse, comme précisé par article 91-1°-b du CGI. Cependant, certaines activités commerciales accessoires, telles que les cantines ou la vente de fournitures scolaires, demeurent soumises à la TVA (article 89 du CGI). Cette distinction entre prestations exonérées et imposées crée un déséquilibre fiscal, impactant les établissements dans leur gestion financière. Une exonération aux conséquences contrastées Si l’exonération de TVA sur les services d’enseignement allège les frais directs des familles, elle engendre une absence de droit à déduction pour les écoles. En conséquence, ces établissements supportent la TVA payée sur leurs achats et investissements comme un coût supplémentaire. Cette situation limite leur capacité à réinvestir dans des infrastructures ou à moderniser leurs équipements pédagogiques, créant ainsi un effet pervers. Ce frein financier réduit non seulement leur marge bénéficiaire, mais pourrait aussi les inciter à augmenter les frais de scolarité pour compenser cette charge. Les avantages fiscaux disponibles pour le secteur Pour atténuer les charges fiscales, le système fiscal marocain prévoit plusieurs avantages destinés aux établissements d’enseignement privé, notamment : Exonération de TVA sur les investissements L’article 89 du CGI exonère de TVA les matériels pédagogiques essentiels (ordinateurs, logiciels éducatifs, équipements de laboratoire, etc.) ainsi que les travaux de construction et d’aménagement des locaux destinés à l’enseignement. Cette mesure encourage les écoles à investir dans des infrastructures modernes et adaptées aux besoins des élèves. Exonération de l’Impôt sur les Sociétés (IS) Conformément à l’article 123 du CGI, les établissements privés agréés par les autorités compétentes bénéficient d’une exonération d’IS sur leurs revenus éducatifs. Cette disposition, à condition d’être respectée, permet aux écoles d’optimiser leur gestion fiscale tout en renforçant leur compétitivité. Allègements en fiscalité locale Les exonérations fiscales ne se limitent pas à la TVA et à l’IS. En vertu de la loi 47-06 sur la fiscalité des collectivités territoriales, les écoles peuvent également bénéficier : D’une exonération de la taxe professionnelle pendant les cinq premières années d’activité; D’une exonération de la taxe d’habitation pour les locaux à usage exclusivement éducatif. Ces mesures permettent de réduire significativement la charge fiscale globale des établissements, bien qu’elles ne compensent pas l’absence de droit à déduction de la TVA. Des solutions stratégiques pour atténuer l’impact fiscal Face aux limites actuelles, plusieurs stratégies peuvent être envisagées pour réduire les effets négatifs de la TVA non récupérable : Fractionnement des activités Les écoles peuvent créer des entités juridiques distinctes pour leurs activités commerciales (cantines, ventes de fournitures, transports scolaires). Cette séparation permettrait de déduire la TVA sur ces opérations imposables, allégeant ainsi la charge fiscale globale. Optimisation des exonérations Pour maximiser les avantages fiscaux, il est recommandé de planifier les investissements en fonction des exonérations prévues par le CGI et de solliciter des certificats d’exonération avant tout achat ou importation de biens pédagogiques. Ces démarches permettent de réaliser des économies substantielles sur le long terme. Dialogue avec les autorités fiscales Les établissements peuvent engager des discussions avec la Direction Générale des Impôts afin d’étudier la possibilité de mécanismes spécifiques de déduction partielle pour les achats essentiels à leur mission éducative. Cette approche pourrait aboutir à des solutions innovantes pour le secteur. Une réforme nécessaire pour un secteur stratégique  L’enseignement privé est un pilier fondamental pour l’amélioration du système éducatif marocain. Une réforme fiscale adaptée, prenant en compte les spécificités et besoins du secteur, pourrait permettre à ces établissements de continuer à jouer leur rôle tout en renforçant leur viabilité économique. Un accompagnement juridique et fiscal sur mesure est donc indispensable pour optimiser les performances financières et respecter les obligations réglementaires.